Des domaines continentaux révélant des âges variés
Les continents associent des domaines d’âges différents. Ils portent des reliquats d’anciennes chaînes de montagnes (ou ceintures orogéniques) issues de cycles orogéniques successifs.
La recherche d’océans disparus
Les ophiolites sont des roches de la lithosphère océanique. La présence de complexes ophiolitiques formant des sutures au sein des chaînes de montagnes témoigne de la fermeture de domaines océaniques, suivie de la collision de blocs continentaux par convergence de plaques lithosphériques.
L’émergence d’ophiolites résulte de phénomènes d’obduction ou de subduction, suivis d’une exhumation.
Les marques de la fragmentation continentale et de l’ouverture océanique
Les marges passives bordant un océan portent des marques de distension (failles normales et blocs basculés) qui témoignent de la fragmentation initiale avant l’accrétion océanique.
Les stades initiaux de la fragmentation continentale correspondent aux rifts continentaux.
La dynamique de la lithosphère détermine ainsi différentes périodes paléogéographiques, avec des périodes de réunion de blocs continentaux, liées à des collisions orogéniques, et des périodes de fragmentation conduisant à la mise en place de nouvelles dorsales.
I – Les cycles orogéniques
A – Définition d’un cycle orogénique
Un cycle orogénique correspond à l’ensemble des étapes qui conduisent à la formation puis à la disparition d’une chaîne de montagnes. Ce cycle s’étend sur plusieurs centaines de millions d’années et traduit la mobilité des plaques lithosphériques.
Il comprend généralement cinq grandes phases : le rifting continental, l’accrétion océanique, la subduction, la collision continentale, puis l’érosion qui efface progressivement les reliefs.
B – Étapes d’un cycle orogénique
1 – Le rifting continental
Le rifting correspond à une phase d’extension de la lithosphère continentale, au cours de laquelle des failles normales découpent la croûte et provoquent la formation de blocs basculés. Cette déformation entraîne l’amincissement de la croûte et prépare la séparation des masses continentales.
Un exemple actuel de rift est observable en Afrique de l’Est, dans la région des Afars. Les mesures par GPS montrent que cette zone est en extension. La topographie en « marches d’escalier » traduit le jeu des failles normales, accompagnées d’une activité sismique intense. L’ensemble de la vallée du Rift est-africain constitue ainsi un témoin direct des premiers stades de la fragmentation continentale.
Les marqueurs de cette étape sont nombreux : données GPS, failles normales, mais aussi séries sédimentaires caractéristiques. On distingue en effet les sédiments anté-rift, recoupés par les failles et solidaires du socle, les sédiments syn-rift, disposés en éventail au pied des blocs basculés, et les sédiments post-rift, qui scellent les failles et enregistrent l’installation progressive d’un milieu marin.
2 – L’accrétion océanique
Lorsque le rift évolue, il peut conduire à l’ouverture d’un océan par accrétion de lithosphère océanique au niveau d’une dorsale. Ce processus est accompagné d’un magmatisme important et d’un métamorphisme hydrothermal (par exemple des métagabbros en faciès schiste vert) qui affecte la croûte en place.
L’exemple le plus représentatif est celui de l’océan Atlantique, ouvert à partir de la déchirure du continent unique Pangée il y a environ 200 millions d’années. Aujourd’hui encore, les mesures GPS montrent que les marges américaines et africaines s’écartent l’une de l’autre de quelques centimètres par an.
Les marqueurs de cette étape sont la mise en place de roches magmatiques (gabbros, basaltes), le métamorphisme hydrothermal, mais aussi la persistance des structures héritées du rifting. Ainsi, les marges continentales passives actuelles révèlent encore :
des blocs basculés et une croûte amincie par failles normales,
des séries sédimentaires témoignant de la transition d’un environnement continental vers un milieu marin de plus en plus profond,
la disposition géométrique des sédiments anté-, syn- et post-rift,
l’existence de marges conjuguées issues de la déchirure d’un même continent.
3 – La subduction
Lorsque l’océan parvenu à maturité commence à se refermer, une zone de subduction se met en place. La lithosphère océanique, plus dense, s’enfonce sous une autre plaque, ce qui entraîne une activité sismique intense et la formation de magmas. Dans certains cas, une portion de lithosphère océanique peut être obduite, c’est-à-dire chevauchée sur le continent au lieu de plonger en profondeur.
Un exemple actuel est fourni par la marge ouest de l’Amérique du Sud, où la plaque océanique Pacifique s’enfonce sous la plaque sud-américaine. Cette zone est marquée par une forte sismicité et par le développement de la cordillère des Andes.
Les marqueurs de la subduction sont notamment les données GPS, qui mettent en évidence la convergence, ainsi que les roches métamorphiques de type haute pression-basse température (HP-BT), comme par exemple les métagabbros en faciès schistes bleus ou encore les éclogites, caractéristiques des contextes de subduction.
4 – La collision
Lorsque deux masses continentales entrent en contact, la subduction océanique cesse et une collision se produit. Celle-ci entraîne la formation de reliefs élevés par plissements, failles inverses et grands chevauchements. Les profils sismiques permettent d’imager ces structures profondes.
Un exemple actuel est la collision entre l’Inde et l’Asie, responsable de la formation de l’Himalaya. En Europe, les Alpes constituent également un témoin récent d’une telle collision.
Dans ces chaînes, on retrouve les traces des étapes précédentes. Par exemple, dans les Alpes, on retrouve :
des blocs basculés comme au col d’Ornon, rappelant le rifting initial,
des ophiolites obduites comme celles du Chenaillet (péridotites serpentinisées, métagabbros en faciès schiste vert, pillow lavas), témoignant de l’accrétion océanique,
des roches métamorphiques HP-BT (schistes bleus du Queyras, éclogites du Viso), vestiges de la subduction océanique.
Les ophiolites, composées d’une succession typique de péridotites, gabbros, basaltes et parfois radiolarites, constituent ainsi des indices précieux de l’existence d’un océan disparu. Dans les Alpes, ces ophiolites forment un alignement interprété comme une suture entre deux plaques entrées en collision. Certaines ont été métamorphisées en contexte de subduction, d’autres n’ont subi qu’un métamorphisme hydrothermal avant d’être obduites sur le continent.
L’ensemble des objets alpins (blocs basculés, ophiolites, roches métamorphiques HP-BT) permet de reconstituer une histoire complète : rifting continental, ouverture océanique, subduction puis collision. C’est le cycle orogénique alpin, entamé au Mésozoïque et toujours actif aujourd’hui.
5 – L’érosion
La dernière étape d’un cycle orogénique correspond à l’érosion progressive des reliefs. Les montagnes s’abaissent, laissant place à des surfaces d’aplanissement et à des massifs anciens.
Un exemple actuel est celui du Massif armoricain, en France. Cette chaîne, issue du cycle hercynien au Paléozoïque, a été totalement aplanie par l’érosion. On y retrouve cependant des marqueurs des étapes précédentes :
des ophiolites et des blocs basculés recouverts de sédiments, témoins d’anciens océans et marges passives,
des roches métamorphiques HP-BT, preuve d’une subduction ancienne,
de grands accidents tectoniques (suture sud armoricaine, faille du Midi dans les Ardennes), signes d’une collision continentale.
Tous ces indices, datés du Paléozoïque supérieur, constituent les traces du cycle orogénique hercynien, qui a précédé le cycle alpin.
II – Des domaines continentaux révélant des âges variés
Même si l’érosion efface progressivement les reliefs, les marqueurs d’anciennes chaînes de montagnes restent souvent visibles. C’est le cas des discordances angulaires, témoins d’un relief érodé puis recouvert par une nouvelle sédimentation, ou encore des grands chevauchements révélés par la sismique.
La carte géologique de France met en évidence la présence de roches métamorphiques et magmatiques issues de plusieurs orogenèses successives (icartienne, cadomienne, hercynienne). Ces vestiges montrent que le territoire français a connu de nombreux cycles orogéniques.
Alors que l’âge des fonds océaniques actuels ne dépasse pas 180 millions d’années, les roches continentales présentent une grande diversité d’âges, allant jusqu’à 4,3 milliards d’années pour les plus anciennes. Ces roches, issues de l’Archéen (entre 4,55 et 2,5 Ga), correspondent aux proto-continents, premiers noyaux continentaux. Elles sont entourées de ceintures orogéniques formées au cours d’orogenèses successives, ce qui témoigne de la mobilité tectonique ancienne.
I – Les cycles orogéniques
A – Définition
Cycle orogénique = suite d’événements qui mènent à la formation puis à la disparition d’une chaîne de montagnes.
5 étapes : rifting → accrétion océanique → subduction → collision → érosion.
B – Étapes d’un cycle orogénique
1 – Rifting continental
Extension et amincissement de la croûte continentale.
Exemple : Rift est-africain (Afars).
Marqueurs :
GPS (extension),
failles normales,
blocs basculés,
sédiments anté-, syn- et post-rift.
2 – Accrétion océanique
Ouverture d’un océan par accrétion au niveau d’une dorsale.
Exemple : Atlantique.
Marqueurs :
GPS (extension),
magmatisme (gabbros, basaltes),
métamorphisme hydrothermal (ex. métagabbros en faciès schiste vert).
Indices témoignant de l'étape précédente (rifting) :
marges passives fossiles avec blocs basculés,
sédiments (anté-, syn-, post-rift).
3 – Subduction
Lithosphère océanique dense s’enfonce sous une autre.
Exemple : Pacifique – Andes.
Marqueurs :
GPS (convergence),
séismes,
volcanisme,
roches métamorphiques HP-BT (métagabbros en schistes bleus, éclogites).
4 – Collision
Convergence de deux lithosphères continentales → épaississement du relief.
Exemple : Himalaya (Inde-Asie), Alpes.
Marqueurs :
GPS (convergence),
plis,
failles inverses,
grands chevauchements visibles en sismique.
Indices des étapes précédentes (exemple Alpes) :
Col d’Ornon = blocs basculés (rifting),
Chenaillet = ophiolites obduites : métagabbros en faciès schiste vert, serpentinite (accrétion océanique),
Queyras/Viso = schistes bleus et éclogites (subduction).
5 – Érosion
Effacement progressif du relief → massifs anciens.
Exemple : Massif armoricain (cycle hercynien).
Marqueurs : plaines.
Indices des étapes précédentes :
ophiolites,
blocs basculés recouverts de sédiments,
roches HP-BT,
grands accidents tectoniques (suture sud armoricaine).
II – Domaines continentaux et âges variés
Marques d’anciennes chaînes : discordances angulaires, chevauchements.
Carte géologique de France : roches métamorphiques et magmatiques de plusieurs orogenèses (icartienne, cadomienne, hercynienne).
Âges :
Fonds océaniques actuels < 180 Ma.
Roches continentales jusqu’à 4,3 Ga.
Proto-continents archéens (4,55–2,5 Ga) entourés de ceintures orogéniques → témoins de la mobilité tectonique ancienne.
Schéma du rifting et de la formation des marges passives
Schéma d'un cycle orogénique
Géologue cartographe (Bac+5 minimum) : il réalise et interprète des cartes géologiques qui représentent les structures de la croûte terrestre (failles, plis, nappes de charriage). Ses travaux sont utilisés pour comprendre l’histoire orogénique d’une région, mais aussi pour aménager le territoire, prévenir les risques naturels ou gérer les ressources.
Technicien·ne en géotechnique et BTP (Bac+2/3 minimum) : il effectue des sondages de sol, analyse la résistance des terrains et identifie les structures géologiques présentes (failles, couches sédimentaires). Ses études servent à concevoir des fondations solides pour les routes, tunnels, barrages et autres grandes infrastructures.
Ingénieur·e en risques naturels (Bac+5 minimum) : il étudie les zones de failles actives, les régions de subduction ou de collision pour évaluer les aléas sismiques et les risques de glissements de terrain. Ses missions servent à protéger les populations et à adapter l’urbanisme dans les zones à forte activité tectonique.
Les Alpes sont-elles encore en formation ou déjà en voie d’érosion ?
Les cycles orogéniques se répéteront-ils indéfiniment ou la tectonique des plaques pourrait-elle un jour s’arrêter ?
En quoi la compréhension des zones de subduction et de collision est-elle essentielle pour prévenir les risques sismiques et volcaniques ?